dimanche 25 septembre 2011

Analyse du modèle de la persuasion de l'École de Yale dans la publicité



Analyse du modèle de la persuasion de l’École de Yale dans la publicité
Par Étienne Lalancette

Introduction
L’école de Yale a basé son modèle de la communication sur différentes composantes. Chacune de ces composantes modifie le sens de la communication et est nécessaire à son bon fonctionnement. La composante message est l’élément primordial de la communication, puisqu’il a le pouvoir d’apporter un changement aux comportements d’un individu. Dans cette analyse, il sera question de trois composantes du message (Paquette; Recueil de notes) : la théorie de l’utilisation de la peur dans le message, de l’influence que possède la répétition d’un message, ainsi que l’influence de l’identification à la source émettrice du message lors de changement de comportement.
Utilisation de la peur de Witte
Le premier processus analysé du message est l’utilisation de la peur. Celle-ci a un grand impact lorsque vient le temps de changer des comportements. Dans le modèle de l’utilisation de la peur (annexe 1.5), il est question de deux modèles et de deux théories – formant le modèle raisonné de l’utilisation de la peur. Les deux modèles sont le modèle des réponses parallèles de Witte et le modèle de la réduction des tensions motivationnelles. Les deux théories sont la théorie de la motivation à la protection et la théorie du comportement planifié. Ces théories forment l’ensemble du modèle de l’utilisation de la peur.
Le modèle des réponses parallèles de Levanthal (annexe 1.2) est un modèle basé sur l’aspect cognitif et le traitement de l’information, chez l’individu. Il met de l’avant la quantité d’information que le cerveau doit analyser. Les informations provenant de la source de la menace, de l’environnement, de l’individu en personne (ses capacités et sa condition physique) sont classées en ordre d’importance (priorité) et interprétées selon leur degré d’intensité. La mémoire à long terme est utilisée pour connoter la menace, selon les expériences antérieures et souvenirs de situations similaires. Lors du traitement de ces informations diverses, le cerveau utilise deux processus de défense dont le but est d’aider l’organisme à conserver un certain équilibre (entre les tensions vécues). Le système de contrôle de la peur et le système de contrôle du danger travaillent parallèlement pour diminuer les tensions. Le contrôle du danger juge du degré d’intensité de la menace ressenti chez l’individu. Le contrôle de la peur répond par l’activation physiologique (peur, stress, adrénaline, sudation, vitesse de réflexion). Il active le système de détente ou de protection (puis les mécanismes d’autodéfense, si nécessaire) et installe parfois de mauvais comportements, dont le but est de diminuer le niveau de stress chez l’individu. Dans ces mauvaises habitudes, on retrouve fumer la cigarette et manger excessivement. Ces deux systèmes évaluent le degré de danger d’une situation, et adapte le corps humain aux demandes de l’environnement, pour résoudre le problème rencontré.
Le modèle de la réduction de la tension motivationnelle de Clark Hull (drive reduction theory) (annexe 1.3) fait aussi partie du modèle de l’utilisation de la peur. Selon ce modèle, le point important lors d’un changement d’attitude, repose sur la diminution de l’intensité ressentie, et le réconfort que cela procure à l’individu. Le modèle propose qu’une menace d’intensité moyenne à élever soit suffisante pour capter l’attention de l’individu, alors qu’une tension extrême le pousserait à l’autoprotection. Une intensité amenant jusqu’à un certain degré de peur engendre de l’anxiété. Celle-ci peut être diminuée par l’apparition d’arguments et de recommandations. Ces recommandations surviennent après que le niveau d’anxiété soit atteint. Elles sont construites d’arguments crédibles en faveur d’un changement de comportement (vers le comportement désiré ex. arrêter de fumer). Selon Bromberg, « Mewborn et Roger ont montré que ce n'était pas la réduction du drive [tension initiale] qui agissait sur l'intention de se conformer au nom du message, mais au contraire son déclenchement.. » (Bromberg; 2005, p.161) Les arguments sont perçus comme acceptables, si la confiance de l’individu est stimulée. La conclusion est centrée sur une valorisation des capacités de l’individu face aux changements. 
La théorie de la motivation à la protection de Rogers se construit sur ces deux modèles (annexe 1.1). Il utilise le modèle cognitif de traitement de l’information considéré comme l’évaluation de la menace, ainsi que le modèle de réduction des tensions (l’action « faire face à »). Par contre, le modèle laisse une grande place aux choix personnels de l’individu. Les actions produites dépendent du niveau d’implication de l’individu et de l’intensité de la menace. S’il considère qu’il ne possède pas ou peu de chance d’être vulnérable, le message n’aura pas d’influence. Il doit être convaincu que les changements sont véritablement pour son bien et il doit posséder suffisamment d’estime de soi pour se dire capable d’exécuter la demande (du changement de comportement). Après avoir traité l’information sortant des modèles précédents, le cerveau est en mesure de choisir la réaction/réponse idéale, face au problème.
La théorie du comportement planifié (annexe 1.4) est une amélioration du modèle de l’action raisonné de Ajzen et Janis. Ce modèle suggère qu’avant toute action, l’individu évalue son intention à effectuer un changement. Pour ce faire, il se questionne sur ses croyances personnelles et sur les conséquences potentielles d’un changement. L’individu évalue la réaction des proches (normes sociales), sa capacité à réussir (normes subjectives) et son attitude face au comportement demandé. L’individu évalue également le contrôle qu’il subit ou possède face au plan d’action. Le temps, l’environnement, l’argent, les connaissances dont il dispose sont des facteurs du contrôle, donc de l’intention de comportement. Ces facteurs peuvent empêcher une action, malgré un haut degré de volonté d’agir de l’individu. « C’est la combinaison du contrôle perçu du comportement (auto-efficacité) et l’intention comportementale qui permet de prédire la réussite du comportement. » (Bromberg; 2006, p.166) L’exemple suivant est une publicité de Nike basée sur la capacité personnelle à réussir. Url :
La publicité suivante fait référence à l’utilisation de la peur de Witte. Elle stimule la curiosité et surprend le récepteur. Celle-ci fut tournée avec de bons moyens financiers. Elle est crédible, sans musique, et avec un slogan accrocheur : « Meth. Not even once. ». La recommandation est créée par la projection dans le futur et le slogan. Par le champ expérientiel, l’individu analyse le message social selon la sévérité des conséquences, le pourcentage d’incidence, le niveau d’intensité de la menace, l’analyse des solutions préconisées et la mise en action, ou refus du changement. Si la tension est trop forte, l’individu ne verra pas les solutions proposées.
La publicité est produite par le groupe social Montana Meth Project Fondation contre la méthamphétamine. Url : http://www.youtube.com/watch?v=6YaO4PMBrJI

La répétition du message
Pour qu’une publicité sociale ait de l’influence sur le comportement des individus, elle doit être répétée à plusieurs reprises. La répétition du message peut se faire entre 7 et 15 fois pour que la rétention soit effective. Ces répétitions aident à l’acceptation du message.  « La répétition du message, un débit de parole moins rapide ou le recours à un support écrit ont pour effet de faciliter l’évaluation minutieuse du contenu. La communication peut aussi inclure des questions rhétoriques qui encouragent la réflexion. » (Leyens; 1997, p.121) Aussi, plus la nouvelle est exceptionnelle, moins le nombre de répétitions est nécessaire. Une nouvelle plus ordinaire crée une tension moins forte, et peut passer plus facilement inaperçue. Aussi, un message dont l’information est complexe, voire technique, demande une plus grande concentration, et un taux de répétition plus élevé. Par contre, plus les répétitions sont nombreuses, plus le message sera difficile à accepter. Une publicité simple avec une musique « jingle » répétitive peut devenir assommante (ex. la publicité du Clan Panneton). Ce retour se nomme « l’effet boomerang ». L’usage d’une musique facilite la mémorisation, par l’association musique/publicité. La rétention d’un message par association stocke l’information en mémoire à long terme. La rétention du message ne se base pas uniquement sur la répétition. La qualité du message et la créativité utilisée sont des facteurs très influents. Selon Jacques de Guise (Paquette; 2008, p.156), la répétition du message « rend l’individu plus familier avec le message; elle lui donne également plus de temps pour réfléchir à certains aspects. » L’exemple suivant fut diffusé à la radio et à la télévision souvent, jusqu’à rétention.
Exemple: « h Le clan Panneton pour déménager, faut signaler le 739-0707, le 739-0707! » Annexe 2.3
Identification de la source
La source émettant le message possède une influence sur la perception que l’auditoire aura du message. Une source non crédible diminuera l’influence du message. Le message pourrait être perçu comme frauduleux. Une source experte exprime un sentiment de confiance, d’assurance et d’authenticité à l’auditoire. L’information du message est traitée de la même manière qu’une matière scolaire, donc un traitement cognitif. L’image d’un expert sous-entend la communication : « Je vais vous apprendre quelque chose ». Le cerveau analyse l’information sur l’aspect plus cognitif, diminuant les tensions émotionnelles. L’information est traitée comme difficilement contestable. L’information émanant d’une source plus attrayante est traitée comme une discussion moins formelle, et donc d’un degré moins important. Elle fait usage des sens et des émotions. L’expert diffuse une image de force et d’assurance. La source attrayante diffuse une recommandation dont l’attirance sexuelle facilite l’acceptation du message. Elle stimule aussi le désir d’être acceptée chez l’individu, de chercher l’approbation des paires. La source attrayante ne stimule pas nécessairement l’image d’autorité nécessaire pour générer un changement de comportement.
Selon Hogg & Terry, « an attractive communicator (in contrast of an expert) is effective regardless of the strenght of the message (Norman;1976) and the timing of source identification (Mill & Harvey, 1972). […] An attractive source is at a disadvantage when the issue involves technical matters as opposed to social opinion (Madduc & Rogers, 1980; Pallak et al., 1983). » (Hogg; 2000, p.215)
L’exemple de l’identification de la source est basé sur l’utilisation de la peur, mais aussi avec l’identification de la source du message. Il est question d’une publicité contre la vitesse au volant de la SAAQ où on y voit un policier marcher sur le lieu d’un accident s’adressant à la caméra. Cette publicité utilise bien les deux aspects de l’identification de la source, le policier représente un symbole autoritaire majeur dans la vie quotidienne, un symbole avec une forte tension émotive. Il représente symbole de l’expert par l’info statistique qu’il communique.

Contre-exemple
Stratégie fautive : mauvais usage de la peur.
La publicité suivante est une publicité sociale par « Office of National Drug Control Policy ». Leur slogan est « Partnership for a Drug-Free America ». Elle est une mauvaise publicité, car elle possède une musique joyeuse inappropriée. Si une musique peut réussir à acheter la loyauté d’un client pour une marque, celle-ci n’aide pas à s’associer à la publicité et à l’intention de comportement. Les paroles sont ironiques  « Hoho busy like a bee, where do I get all this energy, hoho meth! ». L’hyperactivité est un effet ressenti et l’un des principaux arguments en faveur de la consommation. Elle n’est pas crédible, car elle ne fait pas usage de la peur. À vrai dire, elle ne génère qu’une tension de curiosité. Elle devrait faire usage d’un degré très élevé de violence (ou tension) pour empêcher un adolescent de consommer de la drogue. La publicité est pauvre en information, elle ressemble à une publicité de savon. De cette manière, elle sous-entend que la drogue est faite de produits chimiques ménagés. Elle semble avoir été tournée avec peu de moyens financiers. Aucune information directement énoncée; la publicité alimente un cliché discriminant d’une toxicomane et la toxicomanie. Elle dépeint une scène qui n’a peu de sens, considérant que les principaux utilisateurs sont des adolescents, et qu’ils ne consomment pas pour faire du ménage, mais pour s’amuser ou oublier leurs problèmes. La méthamphétamine ne produit pas chez les consommateurs un trouble obsessionnel compulsif du ménage. Mais une hyper activité liée à l’amphétamine présente. La méthamphétamine pour ça part appartient à la famille des amphétamines, est plus précisément un dérivé de l’ecstasy et augmente le niveau de sérotonine dans le cerveau, influençant l’humeur vers l’euphorie.
Publicité de l’ONDCP contre la méthamphétamine
Elle devrait avoir une musique de danger, de suspense, ou aucune musique, comme dans l’exemple de l’utilisation de la peur. Elle devrait avoir des textes informatifs ou statistiques écrits à l’écran, et aussi montrer de meilleurs arguments contre la consommation de méthamphétamine.  
Liste de références

BROMBERG, Marcel & Alain Trognon. 2006. Psychologie sociale, Communication et influence – Partie C. P. 152 à 172. Consulté en ligne le 26 mars 2011. Google Document. Url :http://webcache.googleusercontent.com/search?q=cache:cJ12CNDkP8sJ:olivier.issaurat.free.fr/psycho/comm_influence/Communication+et+influence+partie+C.doc+mod%25C3%25A8le+des+r%25C3%25A9ponses+parall%25C3%25A8les&hl=fr&gl=ca.

HOGG, Michaël A. & Deborah J. TERRY. 2000. Attitides, behavior, and social context : The role of norms and groupe membership. Psychology Press. 360p. Consulté le 3 avril 2011. Google Document. Url :http://books.google.ca/books?id=iEokpHpPkucC&pg=PA215&lpg=PA215&dq=Mill+et+Harvey
+Identification+%C3%A0+la+source&source=bl&ots=eaAPMZdsfa&sig=QD9PCmGBnsah05g1AYki9UI3wqU&hl=fr&ei=b7ygTfe3HtSdgQfR7t3aBQ&sa=X&oi=book_result&ct=result&resnum=2&ved=0CCUQ6AEwAQ#v=onepage&q&f=false


PAQUETTE, Guy. 2010. Recueil de notes de cours : Communication et changement d’attitude. Presse de l’université Laval. 155 p.

Annexe :
Cyberthèse – Publication et diffusion en ligne de thèse. Université Lumière de Lyon. Attitude et
comportement : symétrie et asymétrie. Consultation en ligne (30 mars 2010). Url : http://theses.univ-lyon2.fr/documents/getpart.php?id=lyon2.2010.noumbissie_c&part=230861.


Annexe

1.1 Schéma de la théorie de la motivation à la protection de Rogers
Source : É. Lalancette


Annexe
1.2 Schéma du modèle des réponses parallèles de Levanthal
Source : É. Lalancette


Annexe
1.3 Schéma du modèle de la réduction de la tension motivationnelle (Drive reduction Th.) de 
      Clarck Hull
Source : É. Lalancette



Annexe
1.4 Schéma de la théorie du comportement planifié de Ajzen

Source : Cyberthèse – Publication et diffusion en ligne de thèse. Université Lumière de Lyon. Consultation en ligne (30 mars 2010) Url : http://theses.univ-lyon2.fr/documents/getpart.php?
id=lyon2.2010.noumbissie_c&part=230861


Annexe
1.5 Modèle de l’utilisation de la peur de Witte
Source : É. Lalancette


Annexe
Publicités vidéo

2.1 Exemple publicitaire : utilisation de la peur (Contrôle du danger)
Publicité contre le cristal meth du groupe social Montana Meth Project Fondation. Youtube, url : http://www.youtube.com/watch?v=6YaO4PMBrJI. Consulté le 3 avril 2011.

2.2 Exemple publicitaire : utilisation de la peur (Auto-efficacité)
Publicité de la compagnie Nike « Just Do It ». Youtube, url : http://www.youtube.com/watch?v=0wIRTbY5HNM.Consulté le 3 avril 2011.

2.3 Publicité répétition du message
Publicité de l’entreprise de déménagement Le Clan Panneton. Youtube, url : http://www.youtube.com/watch?v=BVMHvXZN8h8. Consulté le 1er avril 2011.

2.4 Publicité identification à la source
Publicité de la Société de l’Assurance Automobile du Québec. Youtube, url : http://www.youtube.com/watch?v=pc5CyhplN9o. Consulté le 1er avril 2011.

2.5 Publicité contre-exemple. Mauvais usage de la peur. 
Publicité de l’Office of National Drug Control Policy of U.S.A. contre la méthamphétamine. Youtube, url : http://www.youtube.com/watch?v=xOjx6TvMMi8. Consulté le 1er avril 2011.


1 commentaire: